La nuit, le soir, la pleine lune et les étoiles filantes... Mirage déambulait dans son appartement, une bouteille de vin blanc complètement vide à la main. La belle profiler avait perdu de sa splendeur comme chaque soir à la même heure. Oui, chaque soir, elle perdait de son éclat, de sa joie de vivre. Ses sourires passaient à la trappe, elle s'enfermait dans son chagrin et son mutisme. Rien n'y faisait, elle avait renoncé à se battre. Elle laissait juste le temps filer, couler, s'éloigner, l’emmener ailleurs... loin. Très loin, le plus loin possible. S'allonger dans ce lit était un supplice, elle l'imaginait encore. Lui, allongé, ici, dans ce lit, dans SON lit. Ses grandes mains foncés sur son corps frêle, ses doigts épais dans ses fins cheveux. Lui, son parfum, ses sourires. Où est-il maintenant ? Que fait-il ? Pense-t-il encore à elle ? Le temps ne répare pas toutes les blessures. Certaines cicatrices sont atrocement douloureuses, Mirage le sait trop bien, tellement bien. Elle s'ennuie de lui, meurt pour lui, vit encore désespérément avec lui, son souvenir, sa présence passée. Ce temps est révolu, le bonheur s'en est allé, il l'a abandonné, il est partit. Le plaisir de vivre est réservé aux autres, l'amour aux plus chanceux, elle, elle n'ose plus. Elle est perdue, si perdue, paumée si loin, dans un endroit inconnu d'où personne ne revient. Le néant avec pour seule unique lumière, son image, lui, ce qu'il en reste... Est-ce humain de se détruire ainsi ? Est-ce humain de ne plus s'alimenter, de ne tenir debout qu'à l'aide de ses mains lacérées au mur, mur qui bouge, qui flotte et qui s'envole. Est-ce humain d'avoir mal à en hurler, hurler sans voix ? Est-ce possible de vivre alors que l'immensité de notre être n'est plus que poussière. Une poussière noire, sale, horriblement sale.

Elle roule à toute vitesse, le décor file, s'éloigne disparaît. Elle ne sent plus son coeur qui se serre, son esprit est figé sur la route. La ville n'est plus qu'une tâche anthracite dans son rétroviseur, un souvenir, elle-aussi. Elle roule, vite, loin, au plus loin possible jusqu'à que ses yeux se ferment, jusqu'à que son coeur s'endorme. Inconsciente du danger, consciente de son chagrin, elle n'a aucune envie de se ressaisir. Pourquoi tenter de reprendre le dessus si tu hantes mes rêves ? Pourquoi tenter de dormir si mon corps cherche le tien sous les draps ? Pourquoi essayer de rêver si tu vis dans chacun de ses espoirs endormis ? Pourquoi t'es plus là ? Tu m'as laissé toute seule, abandonnée comme une simple trainée... Une trainée, une putain, un vieux chiffon que l'on balance. Et cette route, cette forêt d'ébène, ce silence. Tout est noir, je roule en sens inverse, je n'en sais rien, c'est probable, il n'y a personne. Personne, sauf moi, à quoi je sers, moi, ici, sans toi ?

Les phares de la Camaro lui font mal l'éblouissent, ils piquent. Tellement, un peu trop, ils se rapprochent même. Les médocs rendent dingue ! Ces putains de phares de Camaro se rapprochent. Ils sont brûlants, étincelants. Je rêve, ils sont là, ils foncent droit, tout droit. En sens inverse et les phares sont là, juste là, si près.

Ces phares sont vraiment éblouissants, ils sont fatiguant, brûlants et ils ne cessent de se rapprocher. Ils se rapprochent même extrêmement vite. Lorsque Mirage comprend qu'ils sont face à elle et qu'ils foncent droit sur elle, c'est un peu trop tard. À vrai dire, c'est plutôt elle qui fonçait droit sur ces lumineux phares. Endormie par les médicaments, elle préfère fermer les yeux que réagir. Lorsqu'elle les réouvre, les lumineux phares ont disparus. La route est de nouveau noire, ébène, sombre. Plus de phares, plus de voiture, plus rien. Il ne reste qu'une route foncée et les arbres qui défilent sur les cotés. Mirage ralentit sans même s'en rendre compte, elle se prend la tête entre les mains. Un mal de crane horrible l'empêche de réfléchir correctement, elle ne sait même plus depuis quand elle est ici.

Elle essaye de reprendre son calme mais les larmes noient son visage. La belle Mirage ne sait plus quoi faire, elle reprend donc la route, démarrant en trombe. Soudainement, ces mystérieux phares réapparaissent. Ils sont de nouveau agressifs et brillants mais cette fois-ci ils occultent les rétroviseurs de la Camaro. La profiler fronce les sourcils tout en s'essuyant les larmes, elle ne voit toujours rien. Ce mec doit être énervé, c'est normal après tout. Il serait peut-être dangereux que de sortir de la voiture maintenant. Cependant, il va pas lâcher l'affaire si elle ne s'arrête pas. Que faire ? Mirage est incapable de réfléchir, elle se noie de tristesse. L'inconnu lui colle au cul, il n'y a rien à faire. La jeune femme passe alors sa dernière vitesse, se déportant au même moment sur la voie inverse. Elle met un écart entre elle et son poursuivant avant de s'arrêter d'un coup net, ses pneus en marquent l'asphalte.

La Camaro ne bouge plus. La jeune femme attend, elle coupe le contact. Les deux mains sur volant... Merde...

Là voilà dans une situation catastrophique et dangereuse. Malgré ça, Mirage est complètement ailleurs. Perdue, paumée, elle vient de s'arrêter et ne panique même pas à l'idée de tomber sur un fou furieux ayant envie de casser les dents à la personne qui a faillit lui rentrer dedans. Non, complètement inconsciente, elle reste accrochée à son volant, silencieuse, les yeux dans le vide. Elle pense à lui, encore et toujours. Ces putains de médocs lui bouffent l'esprit, les yeux rouges lacérés par les larmes, elle fixe un point invisible devant elle. Ne sachant quoi faire, ne se rappelant même plus les raisons de son arrêt sur cette route déserte. Déserte, enfin pas tant que ça. Un homme s'avance vers sa Camaro, elle aurait été dans son état normal, elle aurait remarqué l'arme qu'il porte. Malheureusement dans la situation où elle se trouve, elle ne voit rien. Elle entends juste cet homme mécontent qui hurle. Elle comprends les menaces mais ne se sent que guère en danger, complètement abrutie par ces putains de médicaments. La belle Mirage regarde cet homme énervé, les larmes ne cessent de couler, ses yeux lui font si mal, ils brûlent.

Mirage prend un coup d'air frais dans la gueule au moment où cet inconnu ouvre la portière. Il a l'air vraiment sur les nerfs, l'air frais vient de lui mettre une gifle, elle réalise difficilement la situation. Heureusement et je ne sais par quel miracle, la voix agressive de cet inconnu se fait plus calme. Les yeux brûlants de la jeune femme se fixent avec difficulté dans sa direction. Il semble étonné de rencontrer une femme et s'inquiète aussitôt de son état de santé. Apparemment, il ne reste pas que des brutes sur cette planète. Dieu merci.

" Je... Je suis désolée, j'ai failli vous rentrer dedans... " Marmonne la jeune femme qui sort de sa voiture à son tour.

Elle se trouve debout face à un homme qu'elle ne connait pas mais qui semble pourtant soucieux de sa personne. La lumière des phares lui fait encore mal, elle baisse les yeux. Ces derniers sont si douloureux.

Mirage est complètement dans les vapes, elle délaisse même les clés de sa voiture à un parfait inconnu. Elle pourrait s'en mordre les doigts mais la belle semble avoir un peu de chance dans cette drôle de mésaventure. L'homme qui est face à elle est quelqu'un de bien, elle l'ignore encore mais elle est une sacrée chanceuse, elle aurait pu tomber sur un fou, un tueur, allez savoir ce qui peut courir dehors à cette heure-ci. La profiler est épuisée, elle reste appuyée contre sa Chevrolet, les yeux au sol. Elle écoute ce que lui dit son sauveur du soir mais n'en comprends pas grand chose. Les médocs l'empêchent de rester concentrer, elle ne capte pas un tiers de ce qui se passe. Elle voit cet inconnu bien sympathique bouger sa voiture pour la dégager du milieu de la route. Cette dernière est déserte mais ne sait-on jamais. Il passe maintenant plusieurs coups de fil, Mirage s'est de nouveau installée au volant et pour cause, autour d'elle tout tourne dans tous les sens.

Lorsque ce bel inconnu revient, Mirage fait un effort surhumain pour comprendre le sens de sa phrase. Ses grands yeux sont empreints de fatigue mais elle regarde tant bien que mal l'homme qui lui vient en aide, comme ça, gratuitement, il reste des personnes de grand coeur dans ce monde. C'est toujours agréable à remarquer surtout lorsqu'on l'on exerce une profession comme celle de Mirage. Un médecin arrive ? Elle est belle et bien chanceuse mais ce dernier ne pourra pas grand chose pour elle, il lui conseillera d'aller se coucher et de ne plus bouger jusqu'à demain. Certes, mais c'est déjà ça, le problème demeurant comment rentrer se coucher. La belle s'est arrêtée et maintenant elle ne trouve plus la force de repartir.

" Merci.. vraiment, merci beaucoup... Monsieur? " Ajoute-t-elle installée derrière son volant, les jambes touchant la route.

Soudainement le calme s'envole, des gens arrivent. Mirage complètement dans les nuages, ne se rend pas trop compte de ce qui se passe. Une jeune femme brune s'approche d'elle, elle doit à peu près avoir son âge mais la jeune profiler a du mal à se concentrer sur cette inconnue. Cette dernière ne tarde pas à se présenter, Mirage quand à elle lui confie son prénom. Aussitôt, la discussion s'installe, la belle y répond du mieux qu'elle le peut. Complètement désorientée, elle a du mal à rester attentive. Sa tête ne cesse de tourner, elle est épuisée. Le jugement de la médecin ne tarde pas à tomber. Les effets secondaires des antidépresseurs sont parfois dévastateurs lorsqu'on en fait un usage aussi important que Mirage. La jeune femme sent le sommeil qui l'attire, elle a envie de fermer les yeux mais son instinct l'en empêche, elle ne peut pas s'endormir au milieu d'inconnus. Ces derniers paraissent certes très gentil et inquiets pour sa personne mais comment savoir ? Il y a des fous de partout, Mirage est bien placée pour le savoir. Un mari attentionné et doux peut très bien une fois la nuit tombée, s'abandonner au plaisir du découpage de prostituées. Dans cette ville, tout est possible, elle doit rester sur ses gardes et cela malgré son mal de crâne horrible et cette nausée passagère.

La médecin s'est éloignée, elle semble discuter avec le conducteur de la Camaro. Le bel inconnu a une femme, c'est vraiment la merde. Pour une fois que la belle Mirage trouve un homme beau, chose impossible depuis des mois, il faut que celui-ci soit déjà prit. C'est surement pas ça qui va lui donner envie de quitter son ambiance dépressive et son vieil appartement. Elle souffle, se glissant dans le siège. Mais qu'attends-elle au juste ?

Peu à peu Mirage reprend ses esprits mais une bonne nuit au calme allait être obligatoire pour retrouver l'intégralité de sa tête et de ses réflexes. heureusement qu'elle est en week-end et sur aucune affaire importante. Mais voilà qui devrait lui mettre du plomb dans la cervelle, elle sait maintenant qu'elle doit se calmer au risque de se mettre dans de fâcheuses situations. Sur ce coup, elle a eu de la chance, le destin ne serait peut-être pas si conciliant si elle tentait encore le diable dans les jours à venir. Il fallait se rendre à l'évidence, la belle devait prendre un peu sur elle pour garder la tête sur les épaules. Allez Mirage, un peu de nerfs !

Malgré sa tête qui tourne, la belle se lève pour aller à la rencontre de ses sauveurs du soir mais ces derniers viennent déjà vers elle, tant mieux ! La voilà qui se jette de nouveau sur le siège conducteur. Coddy, c'est bien son nom, il me semble, explique à la jeune femme les solutions possibles pour ce soir. Mirage n'en voit qu'une seule, son lit, son lit et le calme de son appartement. Elle ne s'imagine pas chez David pour subir une leçon de morale et cela bien qu'elle aime son frère mais aussi elle ne s'imagine pas être un fardeau pour des inconnus déjà bien trop gentils envers elle. Des gens comme ça on en trouve plus beaucoup, je vous le dit !

" Je vous remercie vraiment, mais si vous pouvez m'accompagner chez moi, ça m'arrangerait. " Demande la jeune femme en regardant Coddy puis sa jolie femme.

Alors cette jeune femme sympathique et attentionnée a la même voiture qu'elle, Mirage ne pouvait s'en douter, peut-être un soupçon aurait été possible devant sa conduite mais la jeune profiler était trop dans les choux pour cela. Pourtant, CJ connaissait par coeur cette voiture et cela se ressentait, sa conduite était douce, c'était un plaisir et heureusement parce qu'il en fallait peu pour que Mirage ait la nausée ce soir. Elle fut alors re-conduite jusqu'à chez elle, quelle chance incroyable avait-elle eu ce soir ? Peut-être que demain, elle ouvrira les yeux pour s'en rendre compte. Ce Coddy McQuartes, sa femme et leur ami, une véritable chance. Des gens biens comme il y en a plus beaucoup, oui Mirage ne cessait de se répéter cela, il faut dire qu'elle tournait un peu en boucle et son état n'arrangeait rien.

Une fois en bas de chez elle, la jeune femme qui conduisait insista pour la ramener jusqu'à sa porte. Mirage affaiblit, accepta rapidement. Malgré son état et son esprit embrumé, elle remercia Coddy installé au volant de sa voiture. Une minute plus tard, elle était chez elle, sauvée. Elle prit bien 5 bonnes minutes pour remercier CJ, lui dressant une liste de compliments sur-mesure. Dans un sourire épuisée, elle ferma la porte lorsque la jeune femme avait quitté l'étage. Mirage gribouilla le nom de son sauveur sur un papier, demain, elle fera une petite recherche au boulot afin de lui rendre visite pour le remercier dignement. Lui et sa femme.

Terminé